Enterrer les morts / réparer les vivants (2000)

27 octobre 2000

Résumé :

Tchekhov écrit Platonov au sortir de l'adolescence, il avait dix-neuf ans. Ses personnages sont bourrés d'énergie, simplement ils ne savent pas où la mettre.

Ces quelques aristocrates russes démunis sont ensemble moins par amitié que parce qu'ils ne savent pas trop où aller. S'aiment-ils vraiment ? Non, mais ils ne peuvent pas vivre seuls, alors ils se regroupent et, pour parvenir à tenir, ils mettent un masque.

Arrive Platonov qui était destiné à un avenir brillant. Il l'a refusé et est devenu instituteur. Aux yeux du milieu dont il est issu, c'est un échec. Mais Platonov va démanteler leur rapport à la réussite, à l'argent, à la famille, au couple - l'association de deux personnes n'est-elle pas souvent identique à celle de ces gens réunis par défaut ? A la fin de la pièce tout est cassé mais quelque chose s'est passé dans la tête et dans la vie de chacun, de sorte qu'émerge une possibilité de construction.

Peut-être vont-ils arrêter de se mentir entre eux et de mentir au monde.

Avant d'imaginer possible la construction, j'ai eu besoin, avec Koltès et Barker de montrer l'inverse.

C'est peut-être parce qu'avant de réparer les vivants, on doit d'abord commencer par enterrer ses morts, y compris sa propre part de mort.

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Crédits :

Mise en scène: Armel Roussel. Interprétation: Karim Barras, Yoann Blanc, Renaud Cagna, Éric Castex, Urteza da Fonseca, Anne Delatour, Stéphanie Delcart, Raphaële Germser, Frédéric Lubansu, Vincent Minne. Scénographie: Armel Roussel. Costumes: Souad Kajjal, Mina Ly. Lumières: Marc Lhommel. Vidéo : Philippe Baste. Création des maquillages: Urteza da Fonseca. Musique originale: Philippe Cam. Assistanat à la scénographie: Anne Marcq. Assistanat à la mise en scène: Raphaële Germser. Direction technique: Marc Defrise. Régie son: Mathieu Dupont. Régie plateau: Éric Hennaut.

Interview d'Armel Roussel 

Comment vivre avec sa mémoire ? Comment vivre avec son histoire ? Comment vivre sans but ? Comment vivre avec la mort ? La mort du père. La mort de l'ami. La mort de l'être aimé. La mort de l'amour. La mort de soi. Comment vivre avec son corps ? Comment vivre sans argent ? Comment vivre avec de l'argent ? Comment vivre seul ? Comment vivre à deux ? Comment vivre dans la société ? Comment vivre libre ? Comment vivre honnête ? Comment vivre malheureux ? Comment vivre malade ? Comment vivre et pourquoi ? Pourquoi vivre sans but ? Comment vivre et pourquoi vivre ?

" Et pan dans la gueule des spectateurs ! " écrit Anton Tchekhov dans son courrier.

Je ne désire pas " monter Tchekhov ", mais Platonov et un Platonov librement adapté puisque le spectacle a pour titre l'une des dernières répliques de la pièce.

Platonov est une matière à théâtre qui restitue un présent immédiat et l'histoire de la société, sans négliger l'aventure cosmique de la vie humaine. Dans sa joie, sa peine, son espoir et son impossibilité d'être, sa désespérance. Si cette " désespérance " tchekhovienne existe, elle ne s'inscrit pas dans un flou poétique mais dans une pièce très concrète et des dialogues musclés composés de phrases très courtes inscrites dans un rythme rapide. De là peut jaillir une émotion, entre rire et larme ou plutôt avec rire et larme. Sans romantisme pour autant. Tout se passe vite, comme si les personnages se précipitaient vers la fin (leur fin) dans la fièvre et le désir. Platonov est tel un tourbillon qu'on ne peut arrêter, fougueux, chaud et direct.

C'est cette impression de fête des sentiments, des sensations, des émotions que je ressens dans Zucco et dans Les Européens, que je retrouve dans Platonov et qui me touche. Dans la structure même de la pièce, on peut retrouver des points communs avec les précédentes dans la mesure où Platonov est aussi une " pièce-mosaïque " dotée d'un langage physique, une pièce éclatée comme le spasme violent d'une dernière fête, un prestissimo suicidaire, une structure fragmentée où personnages et pensées se chevauchent.

Enterrer les morts... est en cours d'adaptation dans cet esprit radical. Un mouvement ultra-rapide qui ralentit à certains moments pour révéler l'existence de l'homme, dans la complexité des émotions, derrière des masques mal ajustés.

" Soyez plus légers, plus fluides, plus simples, moins fatalistes, moins dramatiques, soyez aussi plus joyeux, comme dans la vie. Vie transposée mais vie toujours " disait Tchekhov aux acteurs. On va essayer.

Armel Roussel

Janvier 1999

[e]utopia / Armel Roussel

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